Constant Mutamba : une chute politique à la lumière des lois du pouvoir de Robert Greene [Tribune]

La récente démission de Constant Mutamba, ministre de la Justice en République Démocratique du Congo, a surpris plus d’un. Perçu comme une figure jeune et dynamique, porteur d’un discours de réforme fort, sa chute rapide pose question. Et si les causes de cette chute étaient moins visibles qu’un simple dossier judiciaire ? Et si les vraies explications se trouvaient dans les dynamiques invisibles du pouvoir ?
L’ouvrage de Robert Greene intitulé : « Les 48 lois du pouvoir », nous offre un éclairage stratégique sur ce qui s’est réellement joué.
Loi 1 – Ne surpassez jamais le Maître
Constant Mutamba s’est imposé comme un réformateur, prêt à nettoyer le système judiciaire. Mais vouloir transformer un système sans ménager ceux qui l’incarnent est risqué. En politique, briller trop fort peut aveugler ceux au-dessus de vous, et les pousser à réagir avec brutalité.
À propos, Greene nous enseigne que le pouvoir est sensible à l’orgueil des autres. Et cet orgueil peut coûter très cher à ceux qui l’égratignent.
Loi 3 – Cachez vos intentions
La posture radicale et transparente de Mutamba l’a peut-être desservie. En exposant ses plans, ses attaques contre les détournements, ses dénonciations internes, il a donné à ses opposants le temps et la matière pour organiser sa chute. En politique, la discrétion est souvent plus efficace que le courage médiatique.
Loi 16 – Utilisez l’absence pour renforcer le respect
Très présent sur les réseaux sociaux, dans les médias et sur le terrain, Mutamba s’est rendu trop visible, trop accessible. Or, la rareté fait la valeur. Trop d’exposition crée la banalisation, puis le rejet.
Dans un univers où les ambitions se heurtent aux égo, l’exposition est une faiblesse stratégique.
Loi 33 – Exploitez les faiblesses des autres, mais cachez les vôtres
Ses adversaires ont utilisé contre lui le dossier du projet de prison à Kisangani, où 19 millions de dollars sont en jeu. Vrai scandale ou attaque politique ? Peu importe. En politique, ce qui compte, ce n’est pas la vérité, c’est la perception. Et il semble que cette faille – même supposée – ait suffi pour l’éjecter.
Loi 40 – Méprisez le gratuit
Dans toute signature de contrat, toute faveur, tout accord, il y a un prix caché. Mutamba, en acceptant ou en pilotant certains projets, a peut-être cru que certains risques étaient sans conséquence.
Pourtant, Greene le rappelle : ce qui est gratuit est souvent une dette déguisée. Le piège du pouvoir, c’est de penser que l’on contrôle tout.
Loi 48 – Soyez fluide comme l’eau
Rester figé dans un rôle de « justicier » sans adapter sa stratégie au contexte, c’est offrir à ses ennemis une cible immobile. Mutamba a manqué de fluidité politique. Là où il fallait parfois se taire, négocier ou patienter, il a préféré le frontal. Et le pouvoir frontal finit par se heurter… à un mur.
Conclusion
La chute de Constant Mutamba n’est pas qu’un fait d’actualité. C’est une leçon de stratégie. Elle nous rappelle que dans la sphère politique congolaise – comme ailleurs – il ne suffit pas d’avoir raison pour durer. Il faut aussi savoir se mouvoir dans les jeux d’ombres, de perceptions et d’intérêts.
Comme le dirait Robert Greene :
“Ce n’est pas la justice qui gouverne le monde, c’est le rapport de force.”, dit-on !
Signé : Mukumadi Samba Yannick (Analyste Congolais Indépendant et lecteur passionné des dynamiques du pouvoir )